Interprète et chorégraphe, Aude Lachaise s’intéresse à la manière dont le mouvement dansé peut mettre en scène un propos. Outsiders interroge le stand-up, ce show à l’américaine dans lequel un humoriste s’adresse au public en enchaînant répliques improvisées et mots d’esprit. Trois performeuses aux personnalités différentes, Susanna Cook (Argentine / Etats-Unis), Paula Pi (Brésil) et Aude Lachaise viennent nous parler des inégalités, toutes les inégalités, qu’elles soient raciales, sociales et de sexe. Le geste est comique, le ton léger, la parole a l’air libre, et pourtant les corps peuvent raconter d’autres histoires. Leurs rituels évoquent la violence, la domination ou la soumission. À chacun de les transformer en objet de plaisir ou d’émancipation. C’est cet envers du discours qui nous est donné à voir, par une plongée dans un univers ludique et ambigu.
à propos du stand-up
Il s’agit d’un spectacle comique au cours duquel un humoriste s’adresse au public de manière informelle, sans accessoires, sans costume, en racontant des histoires drôles, souvent inspirées du quotidien, assez courtes et sans interruption. Le spectacle est mis en scène de façon à paraître le plus improvisé possible (notamment, on brise le quatrième mur et on doit éviter de présenter un
personnage stéréotypé), ce qui n’est pas toujours le cas parce que le texte est énormément retravaillé et perfectionné. (Wikipedia )
Dans la continuité de la proposition que j’ai faite pour le Nouveau Festival, je veux m’emparer du sujet au pied de la lettre en laissant libre cours à ma fantaisie et ma faconde. Il m’importe de rester
attachée à l’aspect comique de la proposition et à la performativité du comique : comique visuel, grimace, geste de connivence, imitation, anecdotes personnelles, petit pas de danse… Je veux revisiter la virtuosité du comique, sa physicalité et utiliser sa puissance performative. La thématique que j’ai choisie d’aborder est celle des inégalités. Mon désir était de profiter de l’humour et de la légèreté inhérente à la forme du stand up pour traiter de ce lourd et important sujet des inégalités. Inégalités en générale : raciales, sociales, de genre et de sexe.
Ce sont des sujets au coeur de nos vies et de l’actualité et pourtant très difficiles à aborder. À force de vouloir éviter la maladresse, la bonne conscience, la naïveté, nous ne savons plus quels mots
utiliser et ces problématiques deviennent tabous. Comment rappeler le chemin parcouru et encore à parcourir ? Comment se positionner en tant qu’artiste vis à vis de ces sujets ? Quelle est ma
légitimité pour aborder des thématiques comme la lutte des classes, le mouvement des droits civiques, la question du genre ? Est ce que si je suis une femme blanche hétérosexuelle issue de
la classe moyenne d’un pays démocratique, j’ai le droit d’aborder ces sujets et de me les approprier ? Est ce que si je suis une femme blanche hétérosexuelle issue de la classe moyenne d’un pays démocratique, j’ai le droit de souffrir des inégalités ? Est ce que j’ai d’ailleurs le droit deseulement parler de quoi que ce soit ?
Ces sujets soulèvent à la fois le consensus et le rejet.
C’est aussi le propre des opprimés d’être agaçants. Quoi de plus agaçant qu’une féministe ? Dans le spectacle Outsider, la rencontre, pièce pour 5 interprètes, j’aimerais réinvestir la forme du stand up collectivement, cette forme individuelle issue des milieux populaires américains. L’idée étant d’éprouver ou pas, l’universalité de la parole d’une personne en situation de ressentir les inégalités.
Autrement dit : Le discours d’une artiste blanche et féministe aujourd’hui, celui d’un activiste noir américain ont-ils des points d’achoppement ? Comment résonnent-ils dans la bouche d’un groupe hétérogène en terme d’âge, de sexe, de genre, d’origine culturelle ?
